Leurs yeux, nos légendes

Le Festival 5sur5

La Louvière. Ville étrange. Paradoxale. Entre les industries qui s’éteignent et les projets ambitieux qui la rallument. Elle respire pourtant. De ses idées et de ses événements. Ce 1er septembre, elle inaugurait la neuvième édition de son festival de courts-métrages documentaires. Le bien nommé 5sur5. Comme si elle voulait que ses détracteurs l’entendent de la sorte, hors de ses frontières, pour chasser tous les clichés qu’ils pourraient avoir à lui épingler, ou à lui reprocher. Reçu. Fort et Clair.

Pour mettre la ville sans-dessus-dessous, l’Espace Dragone asbl a invité cinq réalisateurs des quatre coins de l’Europe dont deux Belges. Un Allemand, une Lettonne, un Espagnol, un néerlandophone, une Seneffoise. Chacun a confié ses yeux en prêt à cette résidence cinématographique pour « voir » La Louvière d’une autre manière. Voir la ville autrement, lui donner un relief dont elle n’a pas conscience ou qu’elle a tout simplement oublié dans la lutte pour sa survie économique. Notons que, dans le cadre de Mons 2015, l’un des cinéastes du festival se verra confier la tâche de réaliser un documentaire du même type sur la ville de Mons, choisie comme ville amie, pour les quatre années à venir.

Frederik Anders Grandin (Deutschland), Liga Gaisa (Latvia), Ivan Del Campo (España), Kristof Jakieli (België), Sarah Hirtt (Belgique) sont arrivés à La Louvière alors que la plage étalait encore ses palmiers sur la place Maugrétout. Ils seront désormais plongés dans leur travail tout entier (ainsi que Sarah Bachelart et Nicolas Deru, chargés du making of), sous la supervision artistique de Philippe Hesmans. L’animateur-directeur du Centre culturel Le Sablon à Morlanwelz, est de l’aventure pour la cinquième année consécutive.

La maison du peuple d’Houdeng. Crédit : chemin des loups

Sur le thème de l’impertinence, ils tenteront de tisser des liens avec le passé, le présent et le futur de la ville. Le passé, avec ses Maisons du Peuple et ses lieux de mémoires, ses traditions. Le présent, avec ses habitants, qui pratiquent l’impertinence d’être Louviérois sans le savoir. Le futur, par la réinsertion après la prison. Etrange parallélisme que celui-là. Pourtant, prisonnière de son passé, La Louvière l’est assurément. Comment l’interpréter autrement ? Elle qui veut se détacher de la lourdeur industrielle pour entrer dans une ère nouvelle où elle sera économiquement, culturellement et socialement appréciée comme la 5e ville de Wallonie, où passeraient plus de deux trains par heure, dans sa gare centrale.

Le chapiteau Le Splendide. Photo Fab

Pendant cinq semaines, ces étrangers dans la ville plongeront leurs yeux et leurs sens, au coeur des gens et des histoires. Pour leur soutirer cette substantifique moëlle créatrice de légendes. Ils étaleront tous leurs talents, avec l’espoir que leurs documentaires – projetés lors de la cérémonie de clôture, le 22 septembre sous le chapiteau Le Splendide (voir le programme) – soient diffusés dans les festivals à travers le monde. Et véhiculent ainsi une image de La Louvière qui soit réelle. Non pas l’image que l’on croit avoir d’elle, mais l’image qu’elle renvoie à ceux qui y passent, y travaillent, y vivent. Parce que le mensonge n’est pas dans la ville, il est dans l’ignorance générale, de ce qu’elle est et représente, pour et dans le coeur de ses habitants.

Texte : Fab
Photos :  5sur5/Chemin des Loups/Fab/Alexis Taminiaux

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